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Or, le sens ésotérique d’un fameux poème de saint Jean de la Croix, Nuit obscure, assez nettement inspiré par le Cantique des Cantiques, est rendu par Damien à la figure de Marie qui, absente de cette Nuit obscure, est cette fois nommée dans la dernière strophe de sa Chanson nocturne (1996). Ce titre est suivi par cette parenthèse : « (inspiré d’un poème de saint Jean de la Croix) ». On s’étonne, puisqu’il s’agit d’une chanson, du singulier de l’adjectif « inspiré » (sans majuscule à l’initiale) ; mais Damien ne fait qu’un avec sa chanson !
Cette Chanson nocturne se compose de trois strophes de huit vers, qui alternent avec autant de strophes de six vers, celles-ci en caractères gras. La Chanson de Damien a en commun avec le poème de saint Jean de la Croix l’anaphore de la Nuit (dans la strophe 5 de Nuit obscure) et le motif du cœur, dans les strophes 3 et 6 de cette Nuit, en exacte symétrie. Damien dans sa Chanson inscrit ce cœur au milieu de chaque strophe en caractères gras, où sont repris les vers : « Tandis que mon cœur sommeille, / Loin du mal aride […] ». Mais encore au début de la strophe 4 : « Mon cœur plein de couleurs » [1].
A la fin de cette Chanson, l’évocation de Marie comporte ce détail, sans équivalent dans Nuit obscure : « Sous votre Manteau vermeil ! » L’adjectif au masculin est déjà employé au féminin dans les deux autres strophes de six vers : « Dans l’imagination vermeille ! », « Dans l’Espérance vermeille ! » Ce delta lexical conjugue l’abstrait et le concret, en même temps que le féminin (pour les qualités spirituelles du poète !) et le masculin, avec le « Manteau » de « Marie, ma Guide ! […] vêtue de soleil ».
Dans la strophe 6 de Nuit obscure, le détail de l’éventail de cèdre, qui aère le corps de l’ami, est un symbole de l’union des corps amoureux, confondus dans leur étreinte. Or, cet éventail est l’objet d’une anamorphose redoublée dans la strophe 5 de Damien : « Et je m’endors sans peur […] Abrité par le Grand Cèdre,/ Dame de la Nature, /Abrité par le Grand Cèdre,/ Dame belle et pure ! » Damien évite ainsi le symbolisme érotique de Nuit obscure, dont il dégage le sens purement religieux. La répétition du « Grand Cèdre » équivaut, sur le plan du texte, au battement imaginable de l’éventail, dont jouit alors le lecteur de cette Chanson nocturne de Damien. (La versification de Jean de la Croix produit sans doute le même effet…)
Je cite la dernière strophe de cette Chanson : « Oh Marie, ma Guide ! Oh Marie vêtue du Soleil ! / Votre Amour me veille / Tandis que mon cœur sommeille, / Loin du mal aride, / Sous votre Manteau vermeil ! »
Dans cette strophe, la Guide solaire (Marie), comme Dieu dans la deuxième strophe en gras (« Oh Dieu, vous mon Guide ! / Oh Dieu beau comme le Soleil ! »), contraste avec la Nuit dans la première strophe en gras : « Oh Nuit, toi, ma guide ! » La minuscule de l’initiale du mot « guide » (seulement pour la Nuit) atténue le rapport problématique de cette Nuit, certes « belle comme le soleil », et de Marie. Cette précaution graphique honore la plénitude de la divinité (comme si l’éclat solaire de Marie abritait l’idée de la Nuit). En même temps, le jeu sur les différences sexuelles, dans la Nuit obscure de saint Jean de la Croix, se voit rendu à son sens le plus mystique, dans cette mise en parallèle de Dieu et de Marie (ou de la Nuit, associée à l’Amour dans la strophe 2 : « Oh Nuit, l’Amour veille / Tandis que mon cœur sommeille »). La différenciation (du jour et de la nuit, comme celle du masculin et du féminin) n’est que le moyen de la création, jugé par les hommes à l’aune des tensions qui les agitent.
Or, la majuscule du « Manteau vermeil », attribué à Marie dans la dernière strophe, évoque la symbolique du vêtement céleste, en particulier dans le livre des Rois, dont Melville se souvient à propos de l’exécution de Billy Budd, sous un ciel rose, strié de nuages [2]. Melville évoque en effet le manteau qu’Elie montant au ciel abandonne à Elisée. La passation du pouvoir du prophète, semble être l’objet d’une interprétation déconcertante (et sans doute involontaire) dans cette Chanson : si le « Manteau vermeil ! » (derniers mots du poème) apparaît comme la résultante, et non pas comme la source, de « l’imagination vermeille » et de « l’Espérance vermeille », éprouvées par Damien dans les deux précédentes strophes en gras (où elles sont précédées par le même vers « Loin du jour aride »). Mais cette disposition suggère la prééminence de Marie et de son Manteau, à partir duquel l’œil du lecteur doit remonter dans le poème. Marie jouant un rôle bien connu dans le rapport de Dieu (« Oh Dieu, vous mon Guide ! / Oh Dieu beau comme le Soleil ! » : strophe 4) et des créatures comme Damien : « […] Mes yeux son éblouis, / Une étoile vient de s’envoler ! » (première strophe).
Dans les deux premières strophes en gras, l’interjection : « Oh [Nuit / Dieu] », est reprise trois fois. Mais seulement deux fois dans la troisième : « [Oh Marie] […] ». Les huit inscriptions de cette interjection qui étoilent le texte, comme une clé des rythmes qui l’animent ? Plutôt qu’aux huit coups de cloche qui sonnent la dernière heure de Billy Budd, et puisque cette Chanson recèle une expression de Nerval, on songe au « kiosque […] octogone » qui, dans Aurélia de Nerval, ajoute ses mesures à l’énigme de la « combinaison des nombres », évoquée dans un autre passage. Dans la strophe médiane de la Chanson, les vers : « Mon âme serait un soleil noir / Eteint, mort à jamais ! » se rapprochent en effet du fameux vers de Nerval : « Mon luth constellé porte le soleil noir de la Mélancolie » (El Desdichado). Damien honore ainsi la dimension mystique de la parole de Nerval, à qui il semble néanmoins donner une leçon, ou une aide tardive, relative à son destin tragique… qui sera aussi celui du personnage fictif Billy Budd. Quoi qu’il en soit, ce détail nervalien, sous la plume de Damien, vaut comme une allusion très elliptique (et pas si profane ?) aux rythmes du Rosaire, entendu comme un moyen d’accéder à l’écoute de Marie.
Avant d’aller plus loin, je dévoilerai un aspect moins surprenant de la célébration de l’Un dans les poèmes de Damien. La mise en rapport des quatre éléments naturels caractérise l’esthétique de certains de ses poèmes. L’un d’eux, concerne Marie. Il s’agit d’un poème inédit écrit en 1994, que Damien a placé au tout début de son premier recueil dactylographié.
Sonnet de Lourdes
Heureux qui comme Bernadette a vu Marie ! / Dans l’humble petite grotte de Massabielle / Où Notre-Dame lui a promis le paradis,/ En lui offrant son sourire venu du ciel.
Quand reverrai-je, hélas, cet endroit si joli / Où la nature prends (sic) une place si belle,/ Entourant de ses ramures : la roche bénie / Ou l’Immaculée posa ses pieds maternels ?
Quand entendrai-je le doux bruit de sa source / Qui continue sa miraculeuse course / Comme un fleuve de grâces coulant dans nos âmes ?
Quand admirerai-je les célestes flammes / Que les pèlerins promènent en chantant /Les louanges de notre très sainte Maman ?
Le rapport des quatre éléments naturels est parfaitement défini : l’Air est figuré par « le ciel » de la strophe 1, complété dans le second tercet par « les célestes flammes ». Cette symétrie de l’Air et du Feu encadre celle de la Terre (« la roche bénie » de la strophe 2) et de l’Eau (« le doux bruit de la source [...] Comme un fleuve de grâces coulant dans nos âmes. »)
La douceur ou la grâce est sans contrepartie, mais la rigueur est ... celle de la nécessité du rapport des quatre éléments ? Cette ellipse de la rigueur s’expliquerait par le fameux sonnet de Du Bellay, si présent dans l’esprit de Damien (Du Bellay est un de ses modèles avoués dans la Préface du Florilège). Les détails les plus durs du célèbre sonnet Heureux qui comme Ulysse…, sont-ils évités par Damien en raison de son goût (qui n’est pas constant) pour la douceur, ou bien parce qu’ils hantent vivement son poème, voué à transcender le message du Du Bellay sur un plan purement religieux. La douceur ou la grâce n’allant pas sans la qualité ou principe opposé, si présent dans le sonnet de Du Bellay que remodèle subtilement la plume de Damien.
Chez Du Bellay, le « front audacieux » des palais romains, leur « marbre dur », contrastent avec des motifs fort doux. Damien, trop respectueux de ce modèle, a peut-être tenu à distance de sa plume ces détails en raison du sens trop terrestre qu’ils donnent à la Rigueur divine ; laquelle n’est signifiée dans son poème que par les « célestes flammes », associées dans un paradoxe exquis aux « louanges de notre très sainte Maman ? » Ce paradoxe ne serait pas étranger à ce point d’interrogation, assez rare dans les poèmes de Damien. Et Bernadette, au début du poème, n’est-elle pas mise pour Ulysse ? Et Marie, dans le même vers de Damien, équivaut bien au « beau voyage » du sonnet de Du Bellay (« Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage ») !
J’ai respecté la coquille de la seconde strophe, qui est bien de la main de Damien, dactylographe de ses poèmes, à une époque où il ne pouvait déjà écrire que très difficilement à la main : « Quand reverrai-je […] cet endroit si joli / Où la nature prends une place si belle ». Cette coquille n’en est pas vraiment une ; comme si le « je » (« reverrai-je »), rendu instable par sa confusion avec celui de Du Bellay, s’identifiait à la « nature » tout entière.
Si cette nature entoure de ses ramures une roche bénie, Damien dans d’autres poèmes s’identifie lui-même (ou ses poèmes) à une fleur. On songe à ces propos de Tchouang-tseu : « Le ciel et la terre sont nés en même temps que moi-même ; tous les êtres [la Nature, dans une autre traduction] et moi-même ne font qu’un. » [3] L’aspiration à l’Un, dans la mystique judéo-chrétienne, a en effet été devancée par le questionnement métaphysique des anciens philosophes chinois. Le syncrétisme, dans les poèmes de Damien, ne concerne pas la pensée orientale ; mais ce rapprochement en laisse imaginer d’autres qui, s’ils débordent l’orthodoxie, n’en confirment pas moins le symbolisme ésotérique de Marie.
La célébration de l’Un prend forme visible dans La Dame bleue : sept quatrains se succèdent d’abord, au début desquels Damien se pose comme le sujet de verbes toujours différents, concernant l’amour de Dieu (« votre amour ») ; Dieu étant nommé dans le second vers, toujours le même, de ces sept strophes : « Oh ! mon DIEU ». La strophe 3 : « Je cherchais votre amour […] », annonce le contenu de la huitième strophe : « J’ai trouvé votre amour,/ Oh ! mon DIEU/ Grâce à MARIE / La toute bleue,/ Toute bénie / Et vers elle, je cours ! » [4]
Cette huitième strophe compte deux vers de plus que les autres. Elle est liée, par la répétition de « toute », à la strophe précédente : « Je voyais votre amour,/ Oh ! mon Dieu, / Au bout du carrefour,/ Tout, tout joyeux ! » Ces répétitions de « tout[e] », et d’autant mieux qu’elles sont variées par le genre, expriment la Totalité mystique, qui donne son sens à la file des trente-deux vers, étagés jusqu’à cette bénédiction de Marie. Le nombre 32 est en effet, au moins dans un passage crucial du livre des Rois, celui de la Sagesse divine, et Marie dans la tradition chrétienne, représente le lien, maternel si l’on veut, que cette Sagesse entretient avec les hommes.
Or, la Grâce de Marie accompagne le principe de Justice, réclamé par Damien lui-même dans la première strophe : « J’attendais votre amour, / Oh ! Mon DIEU,/ Pour consumer un cœur lourd / D’un ardent feu ! » La douceur des sonorités de ces quelques vers, contrastant avec la dentale récurrente et les sifflantes, exprime la Grâce, qui interfère avec la Rigueur. Dans la strophe 2, l’espoir d’avoir « un secours / Du ciel bleu » annonce d’ailleurs le bleu de Marie, figure de la Miséricorde dans la dernière strophe.)
Dans le vers 4 des cinq premières strophes, Damien évoque volontiers son état d’âme : « Pour consumer mon cœur lourd », « Pour avoir un secours », « Pour m’aider tous les jours », « Comme les troubadours », et « Pour le garder toujours [votre amour] ». Dans la strophe suivante, la sixième, l’être de Damien s’abolit dans sa vision de Dieu : « Doux comme le velours,/ Lui, si soyeux ! » Autrement dit dans la Douceur divine, complément de Son « ardent feu », mentionné dans la première strophe.
La Grâce l’emporte sur la Rigueur, dans cette oraison. Mais les huit inscriptions en majuscules du nom « DIEU », nous valent une colonne visuelle, qui figure mieux que ne le feraient des métaphores, la droiture qui est celle de la Justice divine. Or, le nom de MARIE, tout à la fin (ou à la base) de cette colonne, avec les vertus particulières que le culte chrétien attribue à Marie, ce nom ajoute sa grâce visuelle à la file assez raide, dont elle confirme pourtant la force, de ces répétitions du nom de DIEU, qui totalisent trente-deux lettres.
Oh ! mon DIEU
DIEU
DIEU
DIEU
DIEU
DIEU
DIEU
DIEU
Grâce à MARIE
Il faut croire que ces mesures ont une vertu particulière, à l’égard du désarroi si chrétien qui inspire les trente-deux vers de la Réponse aux ennemis de Damien (quatre strophes de huit vers). La fausseté des rapports humains, le mépris du sacré et des valeurs qui s’y rattachent (comme la charité), ces fléaux sont mentalement défaits par Damien dans les trois premières strophes, où il affirme successivement, dans leurs quatre premiers vers, le triomphe des valeurs chrétiennes. A partir du vers 5 de chaque strophe, avec la locution « Même si », Damien évoque les fléaux qui dominent l’atmosphère de notre monde, mais dont la foi chrétienne doit « triompher ».
Mon cœur chante en ces jours,/ Jours de joie ! / Mon âme brûle d’amour,/ Amour de Foi ! / Même si nos ennemis rient,/ Rires faux ! / Leur rire n’est qu’illusion,/ Illusion de mots !
Quelle belle fête que Noël, / Noël si gai ! / Oui, il est enfin né l’Eternel, / L’éternel de charité ! / Même si beaucoup le méprise / Mépris ingrat ! / Leur mépris est vantardise, / Vantardise du Moi !
Gardons une grande simplicité / Simplicité sainte ! / Jésus vient pour nous consoler / Consoler nos plaintes !/ Même si l’hypocrisie règne / Règne infernal ! / Son règne déjà saigne, / Saigne dans le mal !
Jésus, Marie et Joseph sourient, / Sourires merveilleux ! / L’amour brille dans leur cœur,/ Cœurs de Feux ! / Même si l’église semble s’écrouler / S’écrouler sans appui ! / Il va triompher le Cœur immaculé / Cœur de Marie !
La quatrième strophe se différencie par une vision de « Jésus, Marie et Joseph » ; cette fois sans référence à leurs fidèles, parmi lesquels se compte Damien, surtout dans la première strophe. Dans le vers 5 de la dernière strophe, Damien critique l’abandon du culte : « Même si l’église semble s’écrouler/ S’écrouler sans appui ! » [5] Or, la réponse de Damien est dans l’unité de ce parcours versifié qui poétise, sur divers plans du texte, le battement du « Cœur de Marie ! » (derniers mots du poème) :
Le « Cœur de Marie » (ou « Cœur immaculé ») pourvu d’une majuscule, est un reflet du « Cœur de Feux » au vers 4. De ces Feux à Marie, c’est le rapport de la Justice et de la Grâce, et c’est en même temps le rayonnement de l’Un, si dépendant de ce rapport. Le multiple, émané de l’Un, est évoqué dans la strophe 2, mais sous son aspect le plus négateur : « Même si beaucoup le méprise [Noël] / Mépris ingrat ! […] Vantardise du Moi ! » La majuscule du Moi est ironique, moins finement que le singulier du verbe méprise, qui limite l’importance de son sujet.
La leçon de Damien est dans le rythme complexe des répétitions de termes : substantifs pour la plupart. La répétition de certains d’entre eux, toujours dans une même strophe, implique parfois une forme verbale (par exemple dans la première strophe : « nos ennemis rient […] Rires faux ! Leur rire ». Puis dans la deuxième, avec les vers déjà cités (« méprise / Mépris […] Leur mépris »), la troisième : « Même si l’hypocrisie règne / Règne infernal !/ Son règne déjà saigne, / Saigne dans le mal », et la quatrième (« sourient,/ Sourires merveilleux »).
Le verbe « saigne », de même que les verbes « consoler », dans la strophe 2 (« Jésus vient pour nous consoler / Consoler nos plaintes : ») et le verbe « s’écrouler » dans la strophe 4, sont bien répétés deux fois dans ces strophes. Mais ils semblent être en marge de l’ensemble impliquant des substantifs et leurs formes verbales qui, répétés dans les strophes où ils s’inscrivent, nous valent un ensemble de trente-et-un mots [6]. Mais le « Cœur de Marie ! », qui forme le dernier vers, renvoie aux premiers mots du poème : « Mon cœur chante en ces jours » ; comme si cette mention inaugurale du cœur complétait cet ensemble, qui semble aussi bien émaner d’elle. Cet ensemble de trente-deux termes poétise l’efficience du « Cœur de Marie », avec des mesures qui évoquent celles des prières égrenées sur un chapelet. (Même si elles ne correspondent pas aux nombres indiqués par François Chenique dans ses remarques sur le Rosaire.)
Pourquoi les trois verbes soulignés devraient-ils être tenus à l’écart de cet ensemble ? Peut-être les formes verbales, même répétées, n’ont pas le même statut dans cette économie poétique, que les simples noms : si tous les noms sont des échos plus nets, même s’ils sont infiniment dégradés, de la Parole divine, leur modèle inouï. Autrement dit le Nom divin, célébré et présentifié dans le Rosaire. Le dernier vers de ce poème, « Cœur de Marie », encourage cette interprétation.
François Chenique, dans son Culte de la Vierge, rappelle que le Rosaire n’a de sens qu’en raison du Nom divin : « Dieu et son nom sont identiques […] il faut […] se réunir en son Nom. Le Nom divin n’est pas “manifestation de Dieu”, mais il est “Dieu dans sa manifestation” […] Il faut donc accepter la “technique” de l’invocation des Noms sacrés.[…] le Nom divin […] est une présence réelle, analogue à celle de l’Eucharistie », il en a « les mêmes effets “transformants” » [7].
Cette transformation est thématisée dans le triomphe du Cœur de Marie, éprouvé par ses adorateurs. Le poème de Damien, par la grâce de ses rythmes, interprète ce triomphe. Etant lui-même, non pas le « Principe manifesté » ! mais un écho spontané, dans le langage humain, de la « manifestation du Principe » (c’est ainsi que Chenique définit le Nom divin). La mort précoce de Damien, en 1997, aura été un signe, de l’impréparation des hommes de notre époque à son sublime message !
[1] Ibid., p. 20-21.
[2] Cette énigme de Melville revit ingénument sous la plume de Damien. Dans le manuscrit du passage évoquant la pendaison de Billy, le « rose de l’aube » qui se déverse sur son corps sublime, surcharge « la shekhina [de l’aube] ». La « shekhina », fortement christianisée par les théologiens du XIXe siècle, nomme l’aspect créateur de la volonté divine dans la kabbale. Sa signification, mais encore ses symboles canoniques (à commencer par la Rose, à laquelle est volontiers comparé le teint de Billy) recoupent ceux du « double principe » dont parle Chenique à propos de la Sagesse divine (surtout dans son aspect féminin, incarné par Marie).
[3] Tchouang-tseu, Œuvre Complète, trad. Liou Kia-hway, Paris : Gallimard, 1985 [1969], p.41.
[4] Damien Dickès, op. cit., p. 27.
[5] Ibid., p. 34.
[6] Strophe 1 : jours, amour, rire (trois fois avec sa forme verbale), illusion.
Strophe 2 : Noël ; Eternel ; mépris (trois fois avec sa forme verbale), vantardise. Strophe 3 : simplicité, règne (trois fois avec sa forme verbale).
Strophe 4 : Marie, Sourire (deux fois avec sa forme verbale) et cœur (quatre occurrences).
[7] François Chenique, op. cit., p. 138-140.
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