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[CAUSERIES JAPONAISES] Uniforme et habillement

Causeries Japonaises

XXIII - Uniforme et habillement

Automne MMXIII, à Hiyoshi

Voilà un sujet typique illustrant le degré de pourrissement de la société française. Alors même que l’uniforme scolaire [1] ne devrait même pas être un problème ou un sujet de discussion, et être accepté sans plus d’analyses dans une société saine, chez nous il n’en finit pas de soulever les passions. Des enragés sont toujours présents pour inverser les fondements de l’être humain.
Je n’essaierai même pas de plaider par la raison la cause de l’uniforme : cela est inutile car, si ce genre d’arguments marchait face à ces acharnés, nous le saurions. Un peu de bonne foi et de bon sens ne peuvent que faire reconnaître l’utilité de l’uniforme dans la société. Il faut cependant croire que ce genre de compétences naturelles n’est pas le fort des hommes-bêtes qui abusent de la raison sans les garde-fous du bon sens et de la bonne foi – c’est-à-dire le refus de l’hybris ou, de façon positive : l’humilité. Plus de garde-fous signifie que les fous sévissent en toute liberté sur notre place publique depuis des années.

Il existe une autre manière de montrer l’utilité de l’uniforme ou, du moins, de prouver que l’uniforme est davantage un allié de la vraie liberté plutôt qu’un moyen de soumission. Pour cela, une fois n’est pas coutume, il suffit de relever des faits, puisqu’il est à la mode de démontrer par les résultats.

Prenez la société française qui interdit et abhorre l’uniforme. Regardez ensuite les gens dans la rue. Ou mieux, dans les écoles de commerce, c’est encore plus frappant : tout le monde est habillé de la même façon. Sans goût, sans particularité véritablement esthétique. Rien n’est imposé par personne mais tout le monde s’habille pareillement dans certaines circonstances. La pression sociale et le jugement incessant du regard des autres obligent insidieusement chacun à s’habiller comme il ne le souhaite pas, sous couvert de liberté d’habillement.

Prenez la société japonaise qui autorise et raffole de l’uniforme. Il est partout : à l’école, à l’entreprise, dans les sports, dans tout un tas de circonstances. Regardez ensuite les gens dans la rue et l’ambiance. Quand ils portent leur uniforme, ils sont « classes » et remplissent mieux leur fonction. Il est ainsi assez étonnant, au début, de voir la petite Japonaise toute timide faire la circulation des voitures dans son petit boulot avec une autorité défiant l’imagination. Regardez ensuite comment les Japonais s’habillent quand ils ne portent pas leur uniforme : une liberté totale, pour le meilleur et pour le pire. Lorsque l’on se promène au Japon, on est étonné par les accoutrements que l’on peut apercevoir car il serait impossible de porter ce genre de choses chez nous puisque l’on serait tout de suite jugé. Mais le pire là-bas n’atteint sans doute jamais le pire d’ici... Au Japon, malgré le soi-disant carcan imposé par la société, le Japonais peut s’habiller comme il l’entend vraiment. Porter l’uniforme le met bien dans la société et lui fait prendre conscience de l’image qu’il projette sur les autres. L’uniforme lui permet d’user sa liberté d’habillement.
Un autre fait très étonnant pour le moderne au Japon se trouve dans la propension inattendue du Japonais, en général très timide, à acquérir toute l’assurance nécessaire lorsque la situation l’exige. Le Japonais tout réservé prendra une autorité exemplaire dans son uniforme d’agent de la circulation, comme si la fonction que signale l’uniforme lui donnait une force et une autorité de facto. Le point à souligner est que l’exercice de cette autorité donnée grâce à l’uniforme apprend à la personne à devenir débrouillarde. L’uniforme l’a aidée à grandir, :si elle ne l’avait jamais porté, elle aurait eu beaucoup plus de difficultés à prendre de l’assurance.

Quelque part, l’uniforme permet de réaligner, à l’école en tout cas, le fond et la forme. Supprimant une mauvaise compétition tournant autour du regard, la seule façon de se distinguer par l’apparence lorsque tout le monde porte l’uniforme est d’avoir un « style », d’être « classe », c’est-à-dire d’extérioriser dans ses actes et sa rigueur vestimentaire sa richesse intérieure. Bref, c’est d’être soi-même et de transpirer son âme à travers les tissus. Il permet aussi de faire prendre conscience de l’importance de la discipline personnelle et de la considération envers l’autre pour qui il est plus agréable et plus respectueux de présenter une mine propre et une figure soignée.

Généraliser l’uniforme, c’est garantir une vraie liberté d’habillement, une intégration dans la société libérée de tout un fiel de mauvais regards, de jugements et de non-dits dont notre société occidentale est bien trop souvent la victime, et faire prendre de l’assurance en multipliant les rôles sans schizophrénie pour autant. Il ne faut pas se méprendre sur mes paroles : il serait tout autant coupable de forcer le port de l’uniforme que de l’interdire. Simplement, les communautés et les corps intermédiaires ont le droit de choisir et d’exercer leur propre autorité, comme les écoles par exemple.

Paul-Raymond
Pour Dieu, Pour le Roi, Pour la France

[1Je ne suis pas, en effet, un adepte des théories du comte de Saint-Simon.

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