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Une certaine illusion laisse croire que tout peut changer du jour au lendemain grâce à une seule action d’éclat, la panacée complète, comme par exemple un coup de force qui remettrait le roi sur son trône. Cela reste pourtant une illusion, aussi douce soit-elle. Comme tout est continuité, la mal fait est fait, et la reconstruction sera longue. La restauration n’est pas une fin : c’est un commencement nécessaire.
J’ai néanmoins l’impression aussi tenace qu’inconfortable que les méthodes revendiquées en faveur d’une restauration dans notre pays sont soit insuffisantes soit erronées.
Un simple combat culturel, aussi nécessaire et essentiel qu’il soit, ne peut pas se mesurer à un courant de destruction érigé sur des principes qui, s’il sont faux et illégitimes, n’en sont pas moins parés de la vérité et de la légitimité de la puissance temporelle. Le combat culturel doit continuer et s’intensifier, mais il ne suffit guère plus qu’à maintenir la flamme et à réveiller certaines consciences égarées sur notre chemin. Il n’y en a pas moins moult victimes perdues et égarées qui se perdent et perdent les autres.
Un coup de force étatique n’est pas non plus enviable. Les deux derniers siècles montrent l’innocuité de tels « coups d’État » ne concernant que la puissance temporelle et la forme extérieure des choses, mais ne touchant ni à l’esprit ni au sacré. Ce genre de restauration musclée, selon des pratiques de facto révolutionnaires en ce qu’elles se résument en une mainmise sur l’appareil désincarné qu’est devenu l’État, ne peut rien apporter de bon. Peu importent les principes de bien et de vérité revendiqués ; peu importent les pieuses volontés qui participent : le mal est avant tout la lutte pour le pouvoir, et l’utilisation d’un appareil afin d’imposer à tous un ordre de choses. L’histoire montre, de plus, que – tant que l’appareil et l’envie du pouvoir sont là – les coups d’État, qu’ils soient d’ailleurs militaires ou électoraux, se succèdent irrémédiablement les uns aux autres.
Finalement, « restaurer la royauté », qu’est-ce que cela veut dire si ce n’est en terminer avec l’hubris en reconnaissant l’homme en tant qu’homme entre Ciel et Terre, homme dont le roi sacré montre bonté, miséricorde et amour, et, en tant que cause subséquente, administrer une bonne politique ? Le piège serait de croire que la politique peut se faire sans ce fond divin, indispensable à l’humanité.
Cela ne veut pas non plus dire qu’il faut abandonner une politique réelle, pour ne pas dire réaliste. Mais, alors, comment faire si l’on refuse toute mainmise sur un appareil jacobin et tout usage des procédés chers aux luttes politiques révolutionnaires ? Il suffit de se concentrer sur la politique en son sens premier : ce qui concerne la Cité. En d’autres mots : ce qui concerne la ville, donc ce qui est proche et sur quoi – en tant que personne et en union avec d’autres gens, même en petit nombre – il est possible de peser. Le drame de notre pays réside certainement dans ces troupeaux de jeunes aussi fougueux que talentueux voulant faire le bien et qui, à cause d’une certaine forme d’hubris et de fascination malsaine pour le pouvoir, ont cru que, si ce n’était à l’échelle étatique, on ne pourrait rien faire. À l’opposé, l’autre drame s’incarne dans ces multitudes dégoûtées de la politique et qui se replient dans leurs localités en faisant du très bon travail mais demeurant victimes d’une violence jacobine, centralisatrice et idéologique.
Ne serait-il pas bon de travailler humblement à faire de la politique, c’est-à-dire à œuvrer pour sa cité, donc sa ville, son voisinage, ce qui est proche, avec le courage politique qui va avec ? La famille d’abord ! La reconquête du royaume passe par cette libération des esprits qui ne doivent viser que le bien et que ce qui est bon pour les peuples des pays de France. Simplement, il faut se débarrasser de la religion républicaine afin de ne tendre qu’au bien.
Imaginez un instant une commune où les habitants s’associeraient et voteraient à la quasi-unanimité le retour du roi sur les terres de la ville… Cette commune serait ainsi réintégrée au royaume qu’elle n’a jamais quitté, et elle pourrait accueillir son roi avec joie. Il suffirait que les habitants, nouvellement sujets, possèdent suffisamment de courage pour gérer réellement leur ville sans les violences républicaine et tous ses appareils. Bien sûr, la République répliquerait sans aucun doute [1], mais que pourrait-elle faire dans son état de délabrement qui est actuellement le sien face à une communauté qui refuserait de verser ses impôts à la République pour les remettre, fort justement, au roi ? Une communauté qui refuserait la justice républicaine pour s’en remettre à la justice royale ? Et, là-dedans, point d’idéologie : les juristes de la ville n’auront qu’à servir leur roi et leurs concitoyens. Tant que le bien, l’efficacité commune et l’humilité primeraient, la dynamique irait dans le bon sens et surmonteraient les difficultés et frictions toujours inévitables chez les hommes.
Le résultat ne pourrait être que bon. Si la République répliquait, ce serait une atteinte à la réelle volonté populaire de cette commune et une violence insupportable exposée à la vue de tous, violence qui réveillerait ceux qui sont encore endormis. S’ensuivrait un cercle vertueux dans l’amorce d’une reconquête du royaume, commune par commune, clocher par clocher, terroir par terroir. Une communauté d’hommes – décidant de redevenir sujets de leur roi, d’affronter les difficultés en se consacrant réellement aux problèmes plutôt que de perdre énergie et humanité dans une lutte d’appareil, dans une sinistre conformation à des lois aussi fausses que mauvaises – serait invincible. Avec humilité et piété, tout est possible. Seule cette politique réelle, concernant la Cité, peut réussir à désamorcer l’idéologie car, quand les gens se connaissent et sont liés les uns aux autres, ils ont plus de difficultés à (se) mettre des étiquettes.
Pour résumer. Programme politique de la restauration : chacun, dans sa proximité urbaine, recrée du lien… convainc de la bonté évidente d’œuvrer pour le bien de tous et de régler les problèmes… constate que seule une restitution de sa commune au roi peut permettre de se libérer des entraves étatiques et républicaines… décide avec ses voisins de cette restauration locale puis la protège les armes à la main si la communauté le veut et le peut, en communion avec le roi. Restauration locale qui transforme une dynamique mauvaise en une bonne dynamique, aux plans matériels et spirituels tout à la fois, pour une restauration réelle essaimant un peu partout.
La reconquête se fera par le bas – la localité – et non par le haut. Imaginez un peu le bonheur de voir une commune voter dans notre soi-disant démocratie la restauration de la royauté sacrée chez elle ! Malgré toutes les protestations, rien ne pourra remettre en cause cette légitimité éclatante, et cette noblesse d’esprit : après tout, seule cette commune est concernée… Cela peut sembler utopique, mais qui a donc sérieusement essayé ? Il suffirait que cela se produise pour renverser la vapeur : réussir à convaincre la majorité d’une commune de la bonté foncière de la royauté sacrée pour tous et pour le territoire serait une victoire bien plus grande et symbolique que tout coup de force romantique entraînant une utopique « conversion » des masses.
Couvrons de nouveau la France de fleurs de lys, et ce dans tous ses pays !
[1] Pensons au Roi au-delà de la mer de Jean Raspail… magnifique roman !
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