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Le but majeur du scoutisme est de transformer des adolescents en hommes fiers de leur foi, de leur pays et de leurs valeurs. Pour ce faire, il s’appuie sur la foi — bien entendu — mais aussi sur l’exemple et le service. Lorsque la société consumériste nous propose toujours plus d’instantanés, de numériques, les scouts, eux savent retourner à la nature et à sa simplicité. Et c’est ici un point important de la transmission, un scout dans la nature est livré à lui-même, il y apprend la débrouillardise, mais surtout, il y apprend des vérités immuables : la simplicité, le respect de la nature donnée par Dieu. Enfin par la vie en communauté, le scout apprend à vivre en société, à rendre service à l’autre, et à servir Dieu. Dans ce billet, nous nous attarderons à exposer ce qui fait du scoutisme un véritable moyen de transmission et à faire un rapprochement avec l’enseignement. L’école, bien que son rôle ne soit pas celui de l’éducation, a une certaine responsabilité vis-à-vis des enfants qu’elle instruit : en étudiant le scoutisme, qui est véritablement une école de vie, nous verrons que l’école pourrait s’en inspirer.
L’adolescence est surement l’une des périodes les plus dure de la vie : le corps change, les perceptions du monde évoluent, les relations amicales, fraternelles, et amoureuses sont en pleines mutations… Le scoutisme, plutôt que de tomber dans l’enfant roi, qui peut se former comme il le veut et même se définir comme il le souhaite, propose une pédagogie bien établie et que d’aucuns qualifieraient d’autoritaire. Les jeunes — quoi que puissent en penser les libertaires — sont en attentes d’autorité, et s’ils se rebellent face à elle, ce n’est que dans un désir de la cerner, de la comprendre et d’en découvrir les moindres aspects. La réponse facile du laisser-faire n’est surement pas la meilleure solution, au contraire, elle donnera des hommes incapables de comprendre l’autorité naturelle, ni même de faire preuve de cette même autorité lorsque celle-ci sera nécessaire, notamment lorsqu’ils deviendront des pères ou des mères de famille. En outre, ce n’est surement pas en étant laissés seuls et sans référence que les adolescents parviendront à devenir des Hommes. A l’opposé, en les guidant, en les accompagnant et en leur montrant le chemin à suivre, on leur donne le moyen de réellement grandir et se rapprocher de Dieu. La confiance, le jeu, le service sont autant de moyens que le scoutisme propose aux jeunes afin de s’accomplir pleinement en devenant Homme, tel que Dieu le veut. Cet accomplissement se doit d’être présent à l’école : à l’image des talents remis par le maître aux serviteurs [1], Dieu veut que nous les fassions grandir et fructifier pour Sa gloire. Ainsi, l’école retrouve ici son essence la plus pure, celle de transmettre les connaissances à la jeunesse, et par là même, former la future élite du pays.
Un bon exemple vaut bien plus qu’une démonstration bancale : une grande partie de la transmission du savoir passe par l’exemple, et c’est également un pilier de la vie scoute. Toute l’organisation de la troupe [2] reflète l’exemplarité qui est demandée à chacun. Cette exemplarité — que ce soit celle des chefs envers la troupe, ou des CP [3] envers les plus jeunes — profite à tous les scouts. En effet, les plus jeunes sont naturellement des adorateurs de leur CP, et souhaitent devenir des scouts à son image. De ce fait, le Chef de Patrouille a une véritable responsabilité envers les plus jeunes, tout ce qu’il fait et dit sera pris pour paroles d’évangile. Les CP deviennent le but à atteindre par les jeunes, et c’est ce but qui les fera grandir et progresser. Cela oblige donc les plus anciens à être intègres et honnêtes, d’abord avec eux-mêmes, mais surtout envers les plus jeunes. Le « faites ce que je dis, pas ce que je fais » n’a pas sa place dans une patrouille. Cette exemplarité se retrouvera dans la vie d’Homme que mèneront les scouts par la suite, que ce soit au sein de leur famille ou sur leurs lieux de travail, le scoutisme est en cela un entrainement particulièrement efficace.
Dans le cas de l’école, le message d’exemplarité s’adresse plus particulièrement aux enseignants. Ils sont ceux par qui passe la connaissance, ils se doivent donc d’être irréprochables, aussi bien dans leurs attitudes que dans leurs relations avec les élèves. Cela passe par une formation, non pas simplement théorique et de connaissances, mais bien pédagogique. Le cerveau d’un jeune n’est rien face à un maître, il se doit donc d’enseigner de manière exemplaire sa matière, sans propager d’idées perverses parmi ses élèves.
Le service est la base même de la sainteté à laquelle nous appelle Notre Très Doux Seigneur, il est également au cœur du scoutisme. De premier abord, la patrouille pourrait ressembler à un grand phare, à la pointe duquel le CP brille de sa force, auréolé par le soutien sans faille de sa patrouille. Cependant, cette considération est parfaitement fausse. En effet, pour continuer la métaphore, la patrouille serait plutôt une pyramide. Que voit-on lorsque l’on regarde une pyramide ? Sa taille et son organisation. Il en est de même pour la patrouille, le CP en constitue la base, il est au service de sa patrouille, le second soutient son CP en supportant le deuxième étage, et ainsi de suite, jusqu’au plus jeune qui conclut la pyramide, simple pierre posée en équilibre en haut d’un bel édifice. Cette image est pleine de sens, chacun à sa mesure est au service des plus jeunes, et c’est seulement par cette conscience du service que la patrouille peut avancer. Souvent, l’année précédant l’intégration d’un scout à la HP [5], il lui est donné comme sujet de méditation l’évangile du lavement des pieds. En effet, suivant les enseignements de Notre Seigneur, le scout se doit de servir son prochain, et en particulier les plus faibles. De plus, ce service apporte tout autant aux plus jeunes qu’aux plus anciens. Les premiers, par l’exemple qui leur est donné via les gestes et les agissements des plus anciens. Quant aux seconds, à l’âge où tout porterait à ne se contenter que de soi, ils vont être obligés d’aller à l’encontre de leur nature pécheresse et individualiste pour se rapprocher du plus petit, et par conséquent de Dieu. Ils prennent ainsi goût à donner gratuitement ce qu’eux-mêmes ont reçu, et par la suite, le feront — plus ou moins naturellement — dans leur vie quotidienne.
Le service doit être replacé au sein même de la fonction d’enseignant. En effet, ce dernier est au service de ses élèves. Le seul moyen de jauger la qualité d’un enseignant devrait être le savoir de ses élèves, tout comme la qualité des chefs ne se jauge qu’aux sourires des plus jeunes à la fin du camp. Bien entendu, il ne s’agit pas de noter les professeurs en fonction des résultats des élèves, mais il s’agit de savoir replacer l’enseignement comme un service, et même un devoir, envers la jeunesse, tout comme la politique devrait être un service envers le peuple.
Le service est également présent dans la relation liant les chefs aux CP et au reste de la troupe. En effet, les chefs n’ont pas pour rôle d’être des amis des scouts, et ne sont pas une supra patrouille qui s’occupe des plus jeunes. Les chefs ont un rôle éminemment important dans la transmission du savoir, ils se doivent d’être une sorte d’arbitre, créant les conditions propices à l’épanouissement des jeunes. Ce rôle d’arbitre ne doit pas empêcher une certaine proximité — contrôlée — avec les jeunes, car les plus grands ont aussi besoin d’objectifs personnels, et doivent apprendre à faire confiance aux chefs, c’est ici le sujet de la prochaine partie.
La confiance est présente à tous les étages du scoutisme, que ce soit les parents et les chefs de groupes envers les chefs, ces derniers et les plus jeunes envers les CP, et les CP envers la maîtrise. Un lien de confiance, plus ou moins tacite, est nécessaire au bon fonctionnement d’une troupe. Et il en est de même dans la vie, sans confiance réciproque, il ne peut rien se créer de profond. Ce lien de confiance attache tout d’abord les plus jeunes envers les CP : à 12 ans, quel poids possède un garçon face à un adolescent de 17 ans ? Par la confiance que le jeune remet au CP, il va apprendre à se remettre à quelqu’un d’autre, à ne pas rester dans sa bulle, mais au contraire à avancer sur le chemin de la vie en s’appuyant sur les autres. Les chefs placent également leur confiance dans le CP, ils lui confient la charge des plus jeunes. Cette confiance établie dans le CP va le responsabiliser et lui enseigner à devenir un meneur d’hommes, mais aussi à prendre soin d’autrui, et à toujours veiller sur les jeunes. La société actuelle pousse l’Homme à ne plus être responsable, mais à se laisser porter par le courant, le peuple n’assume plus ses actes, il suffit de prendre l’exemple de l’avortement pour s’en rendre compte. Au contraire, le scout est prêt à répondre de ces actes et de son engagement devant Dieu.
Là encore nous pouvons rapprocher cette situation de celle de l’école : la confiance doit être au sein de la relation entre les élèves et le professeur. Tout d’abord les élèves doivent avoir confiance en leurs professeurs, confiance que ce qui est appris est utile — il y a ici un sacré travail à faire — mais aussi que leurs professeurs disent la vérité. En outre, il devrait y avoir une certaine confiance entre les parents et les enseignants, confiance qui pousse les premiers à remettre leurs enfants dans les mains des seconds. Il faut pour cela que les professeurs méritent la confiance qui leur est portée, mais aussi que les parents prennent conscience que leurs enfants ne sont pas des saints, et qu’ils n’ont pas toujours raisons face aux professeurs. Il est effarant de voir qu’aujourd’hui certains parents se permettent de critiquer les professeurs en se fondant uniquement sur ce que leur disent leurs enfants.
Le jeu est une composante importante de la vie scoute, et fait partie des souvenirs les plus forts de ceux qui y sont passés. Bien que les scouts soient des hommes en devenir, ils ont encore besoin du jeu pour s’épanouir. Comme dit précédemment, le corps du scout change, et par le jeu, il prend réellement conscience de ses changements, apprend à maîtriser ses aptitudes, notamment par la confrontation avec des plus jeunes. De plus, l’effort physique, inhérent au jeu scout, est un moyen efficace de purifier les pensées. Lors d’activités sportives, il n’y a plus de temps, ni de place pour les tentations du démon. Ce même effort physique enseigne aux jeunes à se dépasser, à aller plus loin que leurs limites psychologiques, et leur permet de ne pas choisir la facilité, mais la difficulté, qui est aussi le chemin de la sainteté. Enfin, le jeu est aussi l’occasion d’une émulation, les jeunes voulant rivaliser avec les plus vieux vont se dépasser, aller bien plus loin que ce qu’ils croyaient possible. Cette saine émulation offre au jeune le goût de se battre pour un idéal, et si aujourd’hui c’est pour un petit bout de tissus à rajouter au staff [6], il est possible que demain ce soit pour sa foi, son pays, ou sa famille.
Le lien avec l’école est ici assez simple, il suffit de prendre exemple sur les universités et les écoles anglaises, qui en sus des cours dispensés poussent les élèves à pratiquer une activité sportive régulièrement. Que ce soit pour apprendre ou pour réfléchir, se dépenser est un moyen très efficace de se libérer l’esprit et d’évacuer la — possible — pression des cours. Enfin l’activité sportive permet aux élèves d’être complets, de ne pas créer uniquement un cerveau, mais une personne entière. Au lycée, les élèves suivent environ deux heures de cours de sport par semaine. C’est trop peu. Plutôt que de lâcher les élèves tôt pour les envoyer se vautrer devant la télévision, les écoles devraient mettre en place des activités sportives alliant entraînements et compétitions pour ceux qui le souhaitent.
Il y aurait tant d’autres sujets à aborder à propos de la transmission par le scoutisme, que ce soit par la vie dans la nature, ou en patrouille, par la méditation et la contemplation de la nature de Dieu et cætera. Cependant, ces aperçus mettent déjà en exergue certains points particulièrement importants de la transmission, qui devraient se retrouver, d’abord dans l’éducation des enfants par les parents, mais aussi, dans une certaine mesure à l’école.
Nous ne prenons que peu de risques en affirmant qu’aucune école de la république française ne met en œuvre ces moyens pour transmettre des connaissances à la jeunesse. Néanmoins, certaines écoles privées se rapprochent par de nombreux points de cette transmission, que ce soit en confiant la charge de plus jeunes à des plus âgés, ou bien par le service. Pour appuyer ces propos, nous pouvons citer l’école de garçons des foyers de charité de Saint Bonnet, dans laquelle les élèves font le ménage de l’école, des salles de classes, mais aussi des dortoirs et de l’internat. De même, les plus âgées encadrent les retraites des plus jeunes, et de ce fait se rapprochent directement de l’exemplarité et du service développés dans le scoutisme. Les élèves devraient être l’âme de l’école, ils participeraient ainsi à sa vie, à son développement, et par conséquent, prendraient part à leurs réussites.
En outre l’école ne peut se réduire à sa fonction principale, une simple transmission de connaissance, mais elle doit aussi apprendre à réfléchir. Ce n’est pas parce qu’untel apprend par cœur son livre de mathématiques qu’il est bon dans cette matière. Il faut — à l’image de la méditation qui vient conclure le Raid et le camp — faire réfléchir les jeunes, d’abord sur eux-mêmes, et ensuite sur ce qui les entoure. Par ces réflexions philosophiques, théologiques, politiques et cætera les jeunes s’ouvriront sur le monde, et développeront leur esprit critique. C’est également cette réflexion qui leur permettra, le jour venu, de savoir prendre la bonne décision au moment opportun, et ce notamment dans leur vie professionnelle ou affective.
Enfin, il est intéressant de faire un parallèle entre la mission d’enseignant et celle de chefs scouts. Nous avons vu que le chef se doit de créer un terrain propice à l’épanouissement des scouts, notamment par la confiance et l’exemplarité. Le professeur, à l’image du chef, se doit de placer ces élèves dans de bonnes conditions pour que ceux-ci apprennent — mais surtout retiennent — ce qui leur est enseigné. De plus, l’enseignant ne doit pas être une simple machine qui crache ses connaissances ; comme le chef, il doit savoir créer des liens avec les jeunes, afin d’établir une relation de confiance réciproque. Cette confiance réciproque étant fondée sur un sens sur le respect de l’autorité et de l’expérience, et dans l’autre sens, sur la responsabilisation des élèves.
Pour conclure cet article, voici l’engagement que prennent les scouts lors de la Promesse.
Crédit photo : Troupe SUF Vercingétorix, 1re Clermont-Ferrand
[1] Mathieu, Chapitre 25.
[2] Entité qui contient en général une trentaine de scouts dans quatre patrouilles.
[3] Chef de patrouille, il est généralement responsable de 5 à 7 jeunes de 12 à 16 ans.
[5] Haute Patrouille, c’est-à-dire le CP et le second.
[6] Symbole de la patrouille, il est composé d’un bâton et d’un fanion à l’effigie de l’animal de la patrouille.
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